Inanna remonte et livre son substitut; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

-Bon dirent les démons, nous allons poursuivre

jusqu’au grand pommier du plat-pays de Kul’aba !

Il l’escortèrent donc jusqu’au grand pommier

du plat-pays de Kul’aba !

Dumuzi s’y trouvait confortablement installé

sur une estrade majestueuse !

Les démons se saisirent de lui par les jambes,

Sept d’entre eux renversèrent le lait de la baratte,

cependant que certains hochaient la tête,

comme la mère d’un malade,

et que les pasteurs non loin de là,

continuaient de jouer de la flûte et du pipeau !

Inanna porta sur lui un regard : un regard meurtrier !

Elle prononça contre lui une parole : un parole furibonde !

Elle jeta contre lui un cri : un cri de damnation !

« C’est lui, emmenez-le! »

Ainsi leur livra-t-elle le pasteur Dumuzi.

Or, ceux qui l’escortaient,

ceux qui escortaient Dumuzi,

Dédaignaient les offrandes de nourriture et de boisson

ne mangeaient point la farine épandue en sacrifice,

ni ne buvaient l’eau versée en libation :

Ils ne comblaient pas de volupté un sein de femme,

Ni ne serraient en leurs bras de doux bambins,

mais arrachaient les enfants des genoux de leur mère

et emportaient de chez son beau-père la jeune épousée !

Dumuzi, tout en pleurs, et ruissselant de larmes,

leva les mains au ciel, vers Utu :

« Utu (disait-il), tu es le frère de ma « femme »

et je suis le « mari » de ta soeur !

C’est moi qui apportais chez votre mère de la crème,

moi qui apportait du lait chez Ningal !

Change mes mains en « mains de serpent »,

change mes pieds en « pieds de serpent »,

pour que j’échappe aux démons

et qu’ils ne me gardent point! »

Utu accepta ses larmes :

Il changea ses mains en « mains de serpent »,

et ses pieds en « pieds de serpent »,

si bien qu’il échappa au démons,

qui ne purent garder

(manquent : la fuite de Dumuzi chez sa soeur, Geštinanna, laquelle adressait alors à Inanna une prière pour qu’on la prît elle même en Enfer, en place de son frère. Arrivée de la « mouche », qui révélait aux démons la cachette de Dumuzi, en récompense de quoi Inanna lui « assignait un destin » favorable.)

……………

Puis comme Dumuzi pleurait,

Ma souveraine vint à lui

le prit par la main (et lui dit) :

« Toi, ce sera seulement la moitié de l’année,

et ta soeur, l’autre moitié !

Lorsque l’on t’y réclamera

on s’emparera de toi-

et lorsqu’on y réclamera ta soeur,

on s’emparera d’elle! »

Voila comment la sainte Inanna

fit de Dumuzi son substitut.

La descente d’Inanna aux enfers extrait choisis v.330-363, v.388-393

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.

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