L'envie de viande-2; Hymne 4, pour Hermès ; Hymnes Homériques ; Hésiode

Voilà ce qu’il dit ; et il poussait

les vaches aux têtes puissantes.

Il traversa, Hermès le magnifique,

bien des montagnes ombreuses,

bien des plaines fleuries.

C’est alors que le vaillant fils de Zeus

jusqu’au fleuve Alphée

poussa les vaches aux front large,

vaches de Phoïbos Apollon.

Elles arrivèrent sans fatigue

dans une étable haute ;

il y avait des abreuvoirs

au bord d’une prairie magnifique.

Alors il nourrit largement

d’herbes les vaches meuglantes,

il les poussa toutes ensemble

au fond de l’étable,

bien repue de trèfle

et d’un souchet couvert de rosée.

Il ramassa beaucoup de bois

et se mit à inventer le feu.

Prenant une belle branche

de laurier, il l’écorça avec du fer

. . . . . . . . . .

le tenant bien en main.

Une fumée chaude apparut.

Hermès est le premier qui nous donna

le feu et l’art du feu.

Il prit une grande quantité

de bois parfaitement sec ;

il creusa un trou, l’y entassa ;

le feu se mit à briller,

lançait au loin des jets de flamme,

brûlait avec violence.

Pendant que la force d’Héphaïstos

faisait prendre le feu,

il tira deux vaches meuglantes

aux cornes courbes hors de l’étable

près du feu. Une force immense

était en lui. Toutes les deux

il les jeta par terre sur le dos,

pantelantes. Il les plia en deux,

les fit rouler sur le flanc,

leur perça la moelle épinière.

Il faisait travail sur travail,

coupait la viande pleine de graisse ;

il faisait griller, enfilées

sur des brochettes de bois,

les viandes, et puis l’échine

-part honorable- et le sang noir

enfermé dans les boyaux.

Tout était disposé bien en place.

Les peaux, il les étendit

sur une roche très dure.

Aujourd’hui encore, après tant d’années,

on peut les y voir.

Du temps a passé, on ne sait pas

combien. Là-dessus

Hermès en joie retira du feu

ces beaux morceaux bien gras,

les mit sur une pierre plate,

les partagea en douze portions

pour qu’on les tire au sort ;

chacune était une part honorable.

Alors Hermès le magnifique

eut envie de ces viandes sacrées.

car il avait beau être immortel,

leur bonne odeur l’obsédait.

Mais il avait le cœur fier ;

il ne se laissa pas aller

malgré son envie à les faire passer

par son gosier divin.

Il emporta donc tout cela,

cette graisse, toute cette viande,

dans l’étable où les poutres sont hautes

et il les suspendit,

comme un souvenir de son vol.

Puis, ramassant du bois sec,

il fit détruire par le souffle du feu

les têtes et les pieds.

Et quand il eut tout achevé,

le dieu, selon le rite,

il lança ses sandales

dans les tourbillons de l’Alphée ;

il laissa s’éteindre les charbons,

prit soin tout au long de la nuit

d’éparpiller les cendres noire,

sous un beau clair de lune.

Il fut de retour

sur les sommets divins du Cyllène

au matin. Il n’avait rencontré

personne su sa longue route,

aucun des hommes qui meurent

ni aucun des dieux bienheureux ;

les chiens n’avaient pas aboyé.

Hermès le bienfaiteur

entra en se glissant de travers

par la fente de la porte

comme un vent d’automne,

comme une traînée de brouillard.

il alla droit au riche autel

qui se trouvait dans la caverne ;

il marchait tout doucement,

sans faire de bruit sur le sol.

Hermès le magnifique sauta

d’un bond dans son berceau.

Il serra autour de ses épaules

son drap comme un enfant

tout petit, il tenait à la main

sur ses genoux un chiffon

pour jouer, tout en regardant la tortue

du coté qui est à gauche.

Mais elle vit bien qu’il était là,

la déesse, et elle lui dit :

« Ô le petit rusé, d’où viens-tu

à cette heure de nuit,

avec ton allure insolente ?

Je vois bien ce qui va se passer :

ou bien, d’ici peu, le fils de Lètô

viendra te ligoter,

tu ne pourras pas te dépêtrer

et il t’emportera ;

ou bien tu sera sans cesse

à chaparder dans tous les coins.

Allez, file. Ton père t’a semé

pour être sans fin le fléau

et des hommes qui meurent

et des dieux qui ne meurent pas. »

Hermès lui répondit

ces paroles pleines d’astuces :

« Ma mère, pourquoi veux-tu

me faire peur comme à un bébé

tout petit, qui n’a pas l’impression

d’avoir commis des crimes,

mais qui s’inquiète et qui a toujours peur

que sa maman le gronde ?

Mais je vais apprendre un métier,

le meilleur des métiers,

qui nous fasse honneur à tous les deux,

à jamais ; dis ce que tu veux,

nous n’allons pas rester ici

seuls de tous les immortels,

dans la richesse et l’abondance

et l’opulence, qu’à croupetons

dans une caverne embrumée.

v.94-172

]]>

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.