Aux fins de décider Erra à reprendre ses activités guerrières, les sept reprennent le thème du Supersage et du Déluge, qu’ils avaient déjà invoqué : le « tapage » des hommes, leur rumeur causée par leur nombre et par leur grouillement, qui importune les dieux. A quoi ils ajoutent un argument inattendu, et que nous n’avions rencontré nulle part encore, sorte de renforcement du thème en question : la multiplication excessive des hommes ne serait pas seulement pour les dieux une cause de trouble et d’ « insomnie », mais une menace ! En somme, dans la ligne de leur système, ils font l’apologie de la guerre à outrance, et leur parti pris les poussent à y rameuter même de purs sophismes : il y a, disent-ils, non seulement trop d’hommes, mais trop d’animaux -domestique qui dévorent les moissons, et sauvages, qui dévorent les troupeaux. C’est là une musique que nous entendons encore plus ou moins distinctement, çà et là de nos jours… Et surtout, ajoutent-ils, dans leur inaction ils s’impatientent et se rouillent. Mais entre ces raisons – trop multipliées pour ne point sentir la plaidoirie et la mauvaise foi, et traduction manifeste d’un idéal de vie qui ne peut pas ne point surgir à partir du moment où, dans une société, une « caste » n’a d’autre raison d’être que la violence et la guerre -, ils ont glissé celle qui touchera le plus Erra dans son orgueil et son amour-propre, ce qu’il rappellera plus d’une fois dans le cours du Poème, et qui constituera comme le nerf psychologique de toute son action : la peur qu’il a d’ « être inférieur à sa réputation et méprisé » par les hommes, voire les animaux, s’il ne se manifeste point par des hauts-faits qui, de sa part, ne peuvent être que martiaux et, par conséquent, brutaux et impitoyables.
Les septs : Ils sont agressifs par naissance, par nature et par destin, Anu, leur père, les donna à Erra comme spadassins. Ils supportent mal, en vrais guerrier de métier, ce temps de paix et de farniente et veulent inciter leur maître à partir en guerre.
Commentaire du poème d’Erra, pg709
Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.
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