Toutes les têtes-noires ne s'abreuvaient plus que de sang; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Or un jour, Šukaletuda,

-car tel était le nom du jardinier-

fondit en larmes et blêmit de chagrin :

il avait bien arrosé les plates-bandes,

Et, jouxtes les carrés, préparé des trous-d’eau :

Mais rien n’avait poussé. Pourquoi ?

Un vent violent avait tout arraché, déraciné !

Que n’avait-il méfait, ce vent tempétueux !

A la face de Šukaletuda,

il avait lancé la poussière du sol,

jusqu’à lui enflammer les yeux,

et Šukaletuda avait du déblayer sans relâche !

Élevant alors les regards,

il considéra les étoiles de l’occident ;

Il prit garde aux esprits qui rôdent, isolés ;

Étudia les signes des démons

qui vagabondent, solitaire ;

apprit comment appliquer les pouvoirs,

En méditant sur les destins assignés par les dieux.

Puis à cinq, dix emplacements inutilisables du jardin,

Il planta une rangée d’arbre ombreux :

des peupliers à la frondaison épaisse,

Desquels, l’ombrage, matin,

midi et soir, ne ferait jamais défaut !

Un beau jour, Madame, après avoir traversé le ciel

et traversé la terre,

Après avoir franchi l’Élam et le Subir,

et longé les passes sinueuses des montagnes,

la Hiérodule, fourbue, arriva au jardin,

Et s’y allongea pour se reposer !

Šukaletuda, cependant, de l’extrémité du jardin, l’épiait !

Devant son sexe, en manière de Pagne, Inanna

s’était attaché les sept-Pouvoirs :

elle avait disposé les sept-Pouvoirs

en guise de cache-sexe.

Ama.ušumgalanna, le pasteur…..

Son auguste sexe que ……

Puis elle s’endormit !

Mais Šukaletuda détacha ce pagne protecteur,

la baisa et la pénétra,

puis il s’en retourna à l’extrémité du jardin !

Le soleil se leva, l’aube parut.

La Femme, alors, s’examina de près-

Inanna s’examina de près,

et comprit qu’on l’avait offensée !

Quelle catastrophe ne provoqua-t-elle pas,

à cause de son sexe outragé!-

Que ne pénétra-t-elle, la sainte Inanna,

à cause de son sexe outragé !

Elle remplit de sang tous les puits (du pays),

Elle amena le sang

dans tous les réservoirs des jardins !

Un serviteur allait-il quérir du bois :

C’est du sang qu’il buvait !

Une servante allait-elle faire le plein d’eau :

C’est du sang qu’elle rapportait !

Toutes les têtes-noires ne s’abreuvaient plus que de sang !

Et elle : « j’entends retrouver mon agresseur,

où qu’il soit! »

Et pourtant, où qu’il fut,

elle ne débusqua point son offenseur !

Que n’a-t-on débité là-dessus !

Que n’a-t-on raconté encore !

Car le jeune homme s’en était allé chez son père :

« Mon père, j’avais bien arrosé les plates-bandes,

Et, jouxtes les carrés, préparé des trous-d’eau :

Mais rien n’avait poussé. Pourquoi ?

Un vent violent avait tout arraché, déraciné !

Que n’avait-il méfait, ce vent tempétueux !

……

Inanna et Šukaletuda v.91-145.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

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