The biology of moral system, il écrit que «la société moderne est pleine de mythes» sur notre bonté : «Les scientifiques seraient humbles et se consacrerait à la quête de la vérité ; les médecins passeraient leur vie à soulager les souffrances ; les professeurs consacreraient la leur à leur étudiants ; nous serions tous fondamentalement respectueux de la loi, tous des âmes bonnes et altruistes qui font passer avant le leur l’intérêt de l’autre1.» L’exagération de nos qualités morales n’implique pas que nous nous trompions sur nous-même. Mais sans aucun doute, la chose est possible. Les circonvolutions inconscientes grâce auxquelles nous parvenons à nous convaincre de notre bonté ont été étudiées en laboratoire bien avant que la théorie de l’artruisme réciproque ne vienne les expliquer. Au cours de diverses expériences, on a demandé à certains sujets de faire preuve de cruauté à l’égard d’un tiers, de l’insulter et même de lui infliger ce qu’ils pensaient être des décharges électriques. Les sujets se mettaient alors à critiquer vivement leur victime, comme pour se convaincre de ce que celle-ci méritait bel et bien un tel traitement – même s’ils savaient que leur victime n’avait commis aucun forfait et, en outre, même s’ils ne connaissaient d’elle que ce que l’on sait d’une personne lorsqu’on la maltraite pendant quelques instants dans un laboratoire. Mais lorsqu’on expliqua aux sujets que leur victime allaient leur infliger un peu plus tard le même traitement, ils eurent tendance à ne pas les critiquer2. Tout se passe comme si le cerveau était programmé suivant une loi très simple : tant que l’on règle des comptes, aucune rationalisation particulière n’est de mise ; la symétrie constitue une défense suffisante pour expliquer notre comportement. Mais si nous trichons ou trompons quelqu’un qui n’a pas triché, qui ne nous a pas trompés, nous essayons de trouver toutes sortes de bonnes excuses pour prouver qu’il le méritait. D’un côté, nous sommes prêts, en cas de confrontation, à défendre la conduite que nous avons adoptée ; de l’autre, nous sommes prêts à combattre avec indignation ce qui pourrait laisser supposer que nous sommes mauvais, que nous sommes indignes de confiance. Notre répertoire de justifications morales est fort large. Des psychologues ont découvert que nous nous excusons de ne pas avoir aidé autrui en minimisant, de diverses manières, ses difficultés («ce n’est pas une dispute, juste une querelle d’amoureux»), notre responsabilité et la compétence de la personne même en matière d’aide3. On est jamais vraiment sûr que les autres vont réellement croire de telles excuses. Mais une célèbre série d’expériences montre (dans un contexte assez différent) à quel point la conscience peut être oublieuse de sa vraie motivation et les efforts qu’elle peut fournir pour justifier les résultats de cette motivation. 1 : Alexander Richard D., The biology of moral systems, Aldine de Gruyter, Hawthorne, New York ; 1987, pg128 2 : Pour les références, voir Aronson Elliot, The social animal, San Francisco, W.H. Freeman ; 1980, pg138-139. Une autre interprétation de ces résultats est que les sujets avaient une peur insurmontable qu’une fois découvertes leurs critiques des décharges violentes leur fussent assenées en représailles. 3 : Ces techniques ont été soulignées par S. H. Schwartz et J.A. Howard, comme il est dit dans Macdonald Kevin, éd. Sociobiological perspectives on human devlopment, New York, Springer-verlag ; 1988. L’animal Moral, Psychologie évolutionniste et vie quotidienne ; Robert Wright ;Folio Documents ; Pg 442-444]]>