1. Quand le sujet est amené à justifier sa conduite, l’hémisphère gauche passe de l’ignorance avérée à la mauvaise foi inconsciente. Exemple : la commande marcher es envoyée à l’hémisphère droit du cerveau d’un individu, et celui-ci s’exécute. Quand on lui demande où il va, l’hémisphère gauche, qui n’est pas au courant de la véritable raison de l’action, va en trouver une autre : «Je vais chercher à boire», dit l’homme, convaincu. Autre exemple : l’image d’un corps nu est projetée rapidement vers l’hémisphère droit du cerveau d’une femme, qui part alors d’un rire embarassé. Lorsqu’on lui demande pourquoi elle rit, elle fournit une explication moins osée que ne l’est la réalité2. Michael Gazzaniga, qui a dirigé quelques-unes de ces expériences sur les cerveaux divisés, dit du langage qu’il n’est que «l’attaché de presse» d’autres partie du cerveau ; il justifie tout acte provoqué par ces parties du cerveau, persuadant le monde extérieur que l’acteur est un être raisonnable, rationnel et honnête3. Il est possible que tout le domaine de la conscience soit lui-même, en grande partie, pariel attaché de presse, qu’il soit le lieu où nos communiqués de presse inconsciemment rédigés s’inspirent d’une conviction qui leur donnera leur force. La conscience trouve une grande variété d’innocents déguisements à la froide et égoïste logique des gènes. «On peut dire que la principale fonction évolutioniste du soi, écrit l’anthropologue darwinien Jerome Barkow, c’est d’être l’organe qui administre les impressions (plutôt que l’organe décideur, comme le prétend notre psychologie populaire)4.» On pourrait aller plus loin et dire que la psychologie populaire trouve elle aussi ses racines dans nos gènes. Autrement dit, non seulement le sentiment de contrôler «consciemment» notre conduite est une illusion (comme le suggère également d’autres expériences neurologiques), mais c’est aussi une illusion intentionnelle, conçue par la sélection naturelle pour donner de la conviction à nos propos. Pendant des siècles, on a abordé le débat philosophique portant sur le libre arbitre avec la vague, mais puissante, intuition que le libre arbitre existait ; nous (le «nous » conscient) sommes responsable de notre conduite. Il n’est pas interdit de penser que cette tranche non négligeable de l’histoire intellectuelle peut elle-mêmme portée au compte de la sélection naturelle – que l’une parmis les plus sacrées d’entre toutes les positions philosophiques est essentiellement une adaptation. 1 : voir Hilgard Ernest R., AtkinsonR.C. et Rita L., Introduction to psychology, New York, Harcourt Brace Jovanovich ; 1975, pg 52 2 :voir Krebs Denis, Denton K. et Higgins N.C., « On the evolution of self-knowledge and self-deception», in Macdonald Kevin, éd. Sociobiological perspectives on human devlopment, New York, Springer-verlag ; 1988, pg 109 ; Gazzaniga Michael, Nature’s Mind : the impact of darwinian selection thinking, emotions, sexuality, language and intelligence, New York, Basic Books, 1992, pg 80 3 :Cité par Timothy Ferris, The mind’s Sky (Bantam Books, 1992), pg 80 4 :Barkow Jerome, Darwin, Sex and Status, Toronto, University of Toronto Press, 1989, pg 104 L’animal Moral, Psychologie évolutionniste et vie quotidienne ; Robert Wright ;Folio Documents ; Pg 444-446]]>