La nouvelle grille ; Henri Laborit ; Folio Essai ; Gallimard. Pg297
]]>Mécanisme de l'agressivité entre nations; Laborit
L’agressivité guerrière entre nations semble posséder des mécanismes assez analogues à ceux de l’agressivité entre deux individus. Elle résulte ainsi de l’impossibilité pour une nation donnée de continuer ses actions gratifiantes, économiques en général. Le plus souvent c’est le groupe dominant de cette nation qui ne peut se gratifier, mais il parvient, puisqu’il est détenteur des moyens de diffusion de l’information, à faire croire à l’ensemble national que son intérêt privé est l’intérêt national et à susciter « l’union sacrée ». Jusqu’ici, il ne semble pas qu’une ouverture horizontale entre classes fonctionnelles de deux nations en imminence de conflit ait jamais pu s’opposer efficacement au déclenchement du conflit. Cependant, dans certains cas l’origine de celui-ci paraît être attribuable à une nation dominante. Comme l’individu dominant, la nation dominante paraît dénuée d’agressivité. Elle se satisfait de sa dominance. Mais comme l’individu dominant elle a immédiatement tendance à étendre son information-structure, son style de vie, considérant que tout le monde doit l’accepter, l’admirer, le partager. Toute structure socio-économique différente de la sienne représente, pour une nation dominante, une structure « barbare » et puisque la sienne lui a permis d’accéder à la dominance, les autres doivent l’imiter et pour cela accepter son « leadership ». Elle a aussi tendance à étendre son emprise économique et à considérer que tous les biens de ce monde lui sont dus, sont sa propriété. En échange, elle fournit son amitié, sa protection, et quelques broutilles à consommer. Ceux qui n’acceptent pas cette soumission sont évidemment des hérétiques, des « méchants », qui doivent être punis car ils menacent la paix du monde dont elle est gardienne. Toute contestation, tout essai de dégagement économique ou structurel déclenche immédiatement de sa part des représailles guerrières. Ces représailles sont toujours justifiées, elles défendent une cause juste, en général la liberté, car la liberté ne peut s’obtenir évidemment que dans l’acceptation de la dominance.