Lois de Babylone: L'obligation à Ishtar/Astarté; Enquête, Hérodote

La plus honteuse des lois de Babylone est celle qui oblige toutes les femmes du pays à se rendre une fois dans leur vie au temple d’Aphrodite pour s’y livrer à un inconnu. Beaucoup d’entre elles fières de leur richesses, refusent de se mêler aux autres femmes et se font conduire au temple dans des voitures couvertes où elle demeurent, avec de nombreux serviteurs autour d’elles. Mais en général cela se passe ainsi: les femmes sont assises dans l’enceinte sacrée d’Aphrodite, la tête ceinte d’une corde, toujours nombreuses car si les unes se retirent, il en vient d’autres. Des allées tracées en tout sens par des cordes tendues permettent aux visiteurs de circuler au milieu d’elles et de faire leur choix. La femme qui s’est assise en ce lieu ne peut retourner chez elle avant qu’un des passants n’ait jeté quelque argent sur ses genoux, pour avoir commerce avec elle en dehors du temple. Il doit, en lui jetant l’argent, prononcer uniquement la formule: « j’invoque la déesse Mylitta » (Mylitta est le nom assyrien d’Aphrodite). Quel que soit la somme offerte, la femme ne refuse jamais: elle n’en a pas le droit, et cet argent est sacré. Elle suit le premier qui lui jette l’argent et ne peut repousser personne. Mais ceci fait, libérées de son devoir envers la déesse, elle retourne chez elle et, par la suite, on ne saurait lui offrir assez d’argent pour la séduire. Celles qui sont belles et bien faites sont vite de retour chez elles, les laides attendent longtemps sans pouvoir satisfaire à la loi; certaines restent dans le temple pendant trois ou quatre ans. En quelques endroits de l’île de chypre existe une coutume analogue1.

1: Mylitta est Ishtar (Astarté), déesse de la guerre et déesse de l’amour, l’une des grandes divinités de Babylone. Le clergé féminin comprenait des prêtresses – dont certaines vivaient cloîtrées et qui pouvaient être de sang royal, des hiérodules, courtisanes sacrées, et des prostituées qui exerçaient leur métier autour du sanctuaire; il s’agit sans doute de courtisanes sacrées, parfois offertes par leur parents au temples, et qui ne pouvaient ne pas résider dans le sanctuaire et se marier, mais ne devaient pas avoir d’enfants. On peut encore voir là une défloration rituelle. Les temples d’Aphrodite à Paphos et Amathonte abritaient également des courtisanes sacrées.

pg 147-148

L’Enquête, Livre I, Hérodote, Edition d’André Barguet, folio classique.

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