Rapprochement des figures mythologiques de Šukaletuda et Išullânu; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Commentaire sur l’allusion au mythe d’Inanna et Šukaletuda dans l’Epopée de Gilgameš (cfr lien ).

Šukaletuda et Išullânu exercent non seulement la même profession et s’occupent particulièrement de palmiers, mais nous savons par un antique « dictionnaire » suméro-akkadien que Šullânu, variante transparente d’ Išullânu, était tenu pour l’équivalent en akkadien de Šukaletuda. D’autre part, le canevas est le même : pour une affaire d’amour (amour physique), Išullânu est puni par Ištar (ndlr:Inanna en akkadien), et nous comprenons mieux comment : il est changé semble-t-il, en un petit animal de jardin, dont le nom (Dallâlu) ne nous dit pas grand chose, alors que šullânu, plus éloquent (il signifie « verruqueux »), ferait penser à un crapaud…….. Seulement, ici, la situation est inversée ; il n’est plus question de viol de la déesse par le jardinier, mais, pour ainsi parler, d’une tentative de viol du jardinier par la déesse : c’est pour son refus de coucher avec elle qu’Ištar punit Išullânu. …….. Ne comprenant pas, dans sa candeur, ou plutôt ne voulant pas comprendre, dans son honnêteté ou sa prudence, ce qu’Ištar lui dit attendre de lui, Išullânu joue sur les différences de sens du même vocable (elle lui propose de « jouir », ce qui se dit en akkadien du même verbe akalû, qui signifie « manger » ; et il refuse donc le « repas »qu’elle lui offre, assurant l’avoir déjà pris chez lui(, ou sur les assonances (elle lui présente son sexe à « toucher » -en akkadien:lapâtu-, euphémisme transparent, et il répond en recourant au verbe de même armature phonétique elpetu, qui signifie « jonc », pour rétorquer que, s’il défère aux désirs de sa provocatrice, non seulement il fera l’objet d’humiliations et de reproches, mais, rejetés de tous, il ne lui restera plus, pour s’abriter du froid, que le « joncs », tout à fait inefficace, d’une misérable cabane hors de la ville.

Commentaires sur les amours d’ Ištar/Inanna pg274

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.

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Le peuplier : protecteur des tempêtes; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

C’est ce même personnage (Šukaletuda) qui trouvera le moyen de faire face aux contretemps propres à compromettre les récoltes potagères et fruitières : les tempêtes, en recourant à des rangées protectrices d’arbres non porteurs de fruits.

Commentaires sur Inanna et Šukaletuda pg 269

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

L'enfer est sur terre; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

On dirait même que l’auteur a pastiché le début d’Inanna aux enfers ; le mot ambigu kur, qui dans ce dernier mythe, s’entend de l’enfer, s’applique ici seulement à la terre des hommes.

Commentaires sur Inanna et Šukaletuda pg 267

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

Conseil d'un père à son fils; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Šukaletuda, en effet, a pris soin de décamper chaque fois chez son père, évidemment Enki, à Eridu, lequel lui a conseillé -stratagème bien digne de l’astuce de son auteur- de se perdre dans le grouillement de la foule urbaine.

Commentaires sur Inanna et Šukaletuda pg 267

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

L'arbre, le jardin; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

L’auteur nous met aussitôt en présence d’Enki, lequel, évidemment pour préparer le cadre du drame, est représenté en devoir de créer l’arbre autour duquel s’organisera ce théatre : le Jardin. Cet arbre, le plus fameux, admiré et vanté dans le pays : le palmier, sera le produit d’une semence naturelle : le propre fard d’Enki, et l’opération « magique » de sa mise en terre s’accomplira, à l’ordre du dieu, des mains du personnage fabuleux, que l’on retrouve ailleurs dans le folklore du cru : le corbeau, lequel, en l’occurrence, se comporte tout à fait comme un homme, et sera même, très vraisemblablement, transformé par Enki en jardinier de se verger prototypique, sous le nom sumérien, dont le sens s’échappe, de Šukaletuda.

Ce jardinier a des ennuis : une tempête a réduit à néant tout son travail. Mais, après avoir réfléchi et pris en compte un certain nombre de données surnaturelles, il trouve le moyen de résoudre son problème : par recours à des pouvoirs corrélatifs aux destinées et à la nature des choses ; et, contre tous les ouragans à venir, il plante une rangée de peuplier s protecteurs, qui auront l’avantage supplémentaire de fournir constamment un ombrage agréable.

Commentaires sur Inanna et Šukaletuda pg 266-267

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Ô vénérable Enki, tu m'as toujours secourue et aidée, livre moi ton fils; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Il est certainement chez mon père,

dans le palais d’Enki !

Et de tirer chemin …. vers l’Apsû d’Enki à Eridu.

Une fois arrivée, elle leva la main vers1 lui :

« Ô vénérable Enki, tu m’as toujours secourue et aidée :

Fais donc sortir cet homme de ton Apsû :

Livre-le moi !

Je ne veux que l’emmener sain et sauf,

en mon sanctuaire de l’Éanna! »

Et Enki lui répondit : « C’est bon! »

Ajoutant: « Ainsi en soit-il! »

la sainte Inanna emmena donc Šukaletuda avec elle,

Depuis l’Apsû d’Eridu.

Elle se plaça en travers du firmament,

comme un arc-en-ciel

…….. s’avança, ……….. s’avança encore ………,

Et Šukaletuda devint de plus en plus petit !

1: On « lève la main vers » un personnage important pour l’implorer : c’est un geste de la prière.

Inanna et Šukaletuda v.235-247.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

A cause de son sexe outragé; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Et voici quelle catastrophe

la Femme provoqua, une seconde fois,

A cause de son sexe outragé-

A cause de son sexe outragé,

voici ce qu’Inanna perpétra :

Enfourchant les nuées …..,

Elle déchaîna les mauvais vents,

Elle fit tourbillonner les cyclones :

Derrière elle s’élevaient ouragans

et tornade de poussière

tandis qu’à côté d’elle, au désert,

se tenaient, sept fois sept

jeteurs de charmes maléfiques, méchants …..

Et elle : « j’entend retrouver mon agresseur,

où qu’il soit! »

Inanna et Šukaletuda v.185-192.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

Toutes les têtes-noires ne s'abreuvaient plus que de sang; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Or un jour, Šukaletuda,

-car tel était le nom du jardinier-

fondit en larmes et blêmit de chagrin :

il avait bien arrosé les plates-bandes,

Et, jouxtes les carrés, préparé des trous-d’eau :

Mais rien n’avait poussé. Pourquoi ?

Un vent violent avait tout arraché, déraciné !

Que n’avait-il méfait, ce vent tempétueux !

A la face de Šukaletuda,

il avait lancé la poussière du sol,

jusqu’à lui enflammer les yeux,

et Šukaletuda avait du déblayer sans relâche !

Élevant alors les regards,

il considéra les étoiles de l’occident ;

Il prit garde aux esprits qui rôdent, isolés ;

Étudia les signes des démons

qui vagabondent, solitaire ;

apprit comment appliquer les pouvoirs,

En méditant sur les destins assignés par les dieux.

Puis à cinq, dix emplacements inutilisables du jardin,

Il planta une rangée d’arbre ombreux :

des peupliers à la frondaison épaisse,

Desquels, l’ombrage, matin,

midi et soir, ne ferait jamais défaut !

Un beau jour, Madame, après avoir traversé le ciel

et traversé la terre,

Après avoir franchi l’Élam et le Subir,

et longé les passes sinueuses des montagnes,

la Hiérodule, fourbue, arriva au jardin,

Et s’y allongea pour se reposer !

Šukaletuda, cependant, de l’extrémité du jardin, l’épiait !

Devant son sexe, en manière de Pagne, Inanna

s’était attaché les sept-Pouvoirs :

elle avait disposé les sept-Pouvoirs

en guise de cache-sexe.

Ama.ušumgalanna, le pasteur…..

Son auguste sexe que ……

Puis elle s’endormit !

Mais Šukaletuda détacha ce pagne protecteur,

la baisa et la pénétra,

puis il s’en retourna à l’extrémité du jardin !

Le soleil se leva, l’aube parut.

La Femme, alors, s’examina de près-

Inanna s’examina de près,

et comprit qu’on l’avait offensée !

Quelle catastrophe ne provoqua-t-elle pas,

à cause de son sexe outragé!-

Que ne pénétra-t-elle, la sainte Inanna,

à cause de son sexe outragé !

Elle remplit de sang tous les puits (du pays),

Elle amena le sang

dans tous les réservoirs des jardins !

Un serviteur allait-il quérir du bois :

C’est du sang qu’il buvait !

Une servante allait-elle faire le plein d’eau :

C’est du sang qu’elle rapportait !

Toutes les têtes-noires ne s’abreuvaient plus que de sang !

Et elle : « j’entends retrouver mon agresseur,

où qu’il soit! »

Et pourtant, où qu’il fut,

elle ne débusqua point son offenseur !

Que n’a-t-on débité là-dessus !

Que n’a-t-on raconté encore !

Car le jeune homme s’en était allé chez son père :

« Mon père, j’avais bien arrosé les plates-bandes,

Et, jouxtes les carrés, préparé des trous-d’eau :

Mais rien n’avait poussé. Pourquoi ?

Un vent violent avait tout arraché, déraciné !

Que n’avait-il méfait, ce vent tempétueux !

……

Inanna et Šukaletuda v.91-145.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

Bien à propos se trouvait le palmier dans la terre du roi; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Ce palmier, progéniture du cours-d’eau,

arbre immortel, nul ne l’avait jamais vu !

Sa « langue » ….. fournirait une moelle ;

de sa barbe-de-fibres on tresserait des nattes ;

Ses surgeons serviraient de règle à mesurer !

Bien à propos se trouvait-il dans la terre du roi :

Sa palme accompagnerait les ordonnances royales !

On le déposerait en offrande

dans les temples des plus grands dieux !

Inanna et Šukaletuda v.76 -85.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>

Il s'emplit la bouche de date sucrées; Bottéro-Kramer; Lorsque les dieux faisaient l'homme.

Corbeau, je vais te dire quelque chose : écoute-moi !

Le khôl des exorcistes d’Eridu,

Entreposé dans un vase à onguents, en lazulite,

qui se trouve en la chambre de la maison du prince (Enki),

Concasse-le, pulvérise-le,

et plante cette grenaille parmis les plattes-bandes, jouxte le marécage-aux-poireaux !

Que m’a-t-on débité là-dessus !

Que m’a-t-on raconté encore !

Le corbeau, déférant aux ordres de son maître,

concassa et pulvérisa

le khôl des exorcistes d’Eridu,

Entreposé dans un vase à onguents, en lazulite,

qui se trouve en la chambre de la maison du prince (Enki),

et il planta cette grenaille parmi les plates-bandes

jouxte le marécage au poireau

et dont la frondaison rappelle le poireau,

Nul ne l’avait jamais vu !

Un oiseau comme ce corbeau

qui fît un travail d’Homme :

lançât en l’air des pelletées de terre,

pour les amonceler,

Nul ne l’avait jamais vu !

Après quoi le corbeau s’élança de la ……

Il escalada le palmier feuillu.

S’emplit la bouche de date sucrées,

et donna du bec sur……,

ndlr : le khôl est une poudre minérale autrefois composée principalement d’un mélange de plomb sous forme de galène, de soufre et de gras animal, utilisée pour maquiller et/ou soigner les yeux.(wikipédia)

Inanna et Šukaletuda v.51 -75.

Lorsque les dieux faisaient l’homme, Mythologie mésopotamienne par Jean Bottéro et Samuel Noah Kramer, Bibliothèque des Histoires, nrf, Éditions Gallimard.]]>